Accueil > Naming > Naming : les mots de la gen Z – partie 1

Naming : les mots de la gen Z – partie 1

Cartographie des maux et remèdes du monde contemporain

L’agence de branding et naming Labbrand a lancé cette année VOCALIZ, le concours étudiant de création de mots nouveaux. Le concours a recueilli cinquante propositions de participants âgés de 18 à 23 ans, issus d’une quinzaine d’écoles.  Les équipes des départements Naming et Études de Labbrand ont analysé l’intégralité des propositions des participants afin de mieux comprendre les enjeux qu’ils ont mis en avant. 

Un tiers des étudiants se sont lancés dans l’invention de néologismes qui reflètent leur regard critique sur le monde actuel. Ils sont répartis dans des thématiques d’actualité : société, climat, technologie. Ces termes captivants esquissent une cartographie sémantique de notre époque. Pour chacune des grandes thématiques explorées, deux types de mots émergent. D’un côté, les mots-sanctions traduisent le besoin de verbaliser, concrétiser des phénomènes négatifs. De l’autre, les mots-solutions sont la première étape vers un remède.  

Critiques de notre société et de son fonctionnement

Les propositions se répartissent dans plusieurs grandes thématiques liées à l’actualité. La première thématique est critique envers notre société et son fonctionnement. Révélateur d’un sentiment d’anxiété globalisé, le mot asocialypse (Martine) décrit le « phénomène d’une société où rien ne va et tout s’effondre ». Constat brutal d’une impression de déliquescence, « asocialypse » résonne comme un avertissement. 

D’autres mots-sanctions viennent condamner plus précisément des dysfonctionnements de notre société :  

  • Justiception (Clara) : néologisme créé avec les mots « justice » et « perception ». Il évoque « la réalité selon laquelle la perception de la justice n’est pas universelle, ce qui peut donc engendrer des conflits. Les cultures, les sociétés et les individus ont souvent des perspectives différentes sur ce que signifie la justice. » 
  • Labellosophisme (Anaïg) : « étiquetage d’une personne ou d’un groupe, les associant à un ensemble de croyances jugées à tort indissociables, qui s’est développé dans les médias et empêche les débats de fond. » 

Ces mots-sanctions se présentent principalement sous forme de mots-valise (fusion de deux mots dont au moins l’un des deux a perdu une partie de son signifiant). Ils sont construits comme des grands concepts ou courants de pensées.  

Au-delà de ces constats, l’exercice créatif a également permis la naissance de mots qui traduisent la volonté d’engagement des jeunes. C’est le cas de pacifester (Hugo) qui définit le fait de « manifester pour la paix ». Un verbe d’action qui contraste avec les propositions plus conceptuelles. 

Crise climatique

Sans grande surprise, la crise climatique est une thématique forte. C’est un terreau fertile pour la création de mots qui illustre bien les approches créatives de mots-sanctions / mots-solutions. Parmi les mots qui mettent en avant la préoccupation pour l’environnement, « mercurifie » (Adam) illustre le besoin de concrétiser le réchauffement climatique. « Le terme « mercurifie » est le terme scientifique utilisé pour décrire les phénomènes de changements de température liés au réchauffement climatique, notamment les fortes chaleurs en hiver. Nous craignons donc de voir notre climat devenir de plus en plus « mercurifie », avec des températures élevées et instables, même pendant les saisons normalement froides. » 

Sur cette thématique, cependant, la part belle a été donnée aux mots-solutions :
  • Écobiocratie (Celou) : « régime politique dominé par les intérêts des écosystèmes, dont les principes dominants sont la justice environnementale, la préservation de la biodiversité et le partage des ressources 
  • Écomotion (Maxime) : fusion d’écologie et émotion, le but de ce néologisme est de « représenter les émotions ressenties en réponse aux enjeux environnementaux et aux actions entreprises pour la préservation de la planète. Il exprime l’idée que nos émotions sont de plus en plus influencées par les questions environnementales, comme la préoccupation pour le changement climatique, la joie de contribuer à des actions écoresponsables, ou l’anxiété liée à la dégradation de l’environnement. « Écomotion » met en lumière l’impact émotionnel croissant de notre relation avec la nature et la planète. Il pourrait être employé pour évaluer nos émotions/ressenti faces aux enjeux écologique. » 
  • Écophélie (Diana) : fusion d’écologie et de « phélie » pour affection, ce néologisme décrit le « sentiment profond d’amour et de connexion envers la nature, un attachement qui pousse les gens à prendre soin de l’environnement de manière proactive. » 

Ces mots démontrent une recherche active de nouveaux concepts pour exprimer leur sensibilité environnementale dans le langage. Ces créations suggèrent que la génération Z aspire à intégrer les préoccupations écologiques dans tous les aspects de la vie. 

Les mots-solutions tendent à nous projeter dans un nouvel équilibre du monde, avec une nouvelle relation à la nature. Une des créations décrit ce moment suspendu de reconnexion absolue avec la nature : « célestaquie » (Yohann). « Célestaquie représente poétiquement le reflet distordu d’un rayon de soleil sur une goutte d’eau, capturant l’essence lumineuse et fluide de ce phénomène naturel. »

Révolutions technologiques

Les nouvelles technologies représentent également un thème fort pour la génération Z. Dans cette thématique, leurs néologismes ont surtout traduit des sentiments négatifs. Globalement, leurs propositions permettent d’illustrer que ces jeunes ultra-connectés voient les limites de la révolution technologique. Technacrimonie (Adija) mêle la technologie et l’acrimonie dans un néologisme saisissant. « Technacrimonie » décrit l’aggravation de la violence humaine à travers les écrans, où la méchanceté et la critique se déversent, détachant l’individu de sa propre humanité. Un avertissement sur l’impact réel de nos interactions virtuelles. Un autre exemple des problématiques liées à la technologie est Versaphobie (Gaspard). Il parle de la peur inconditionnelle du metaverse, et de sa menace potentielle envers notre réalité. Un mot d’avertissement face à l’avènement des mondes virtuels. 

Ces questionnements face aux dérives des nouvelles technologies trouvent cependant une solution dans la recherche de conciliation. Modernition (Bilal) met en lumière la « nécessité de préserver les aspects positifs de la culture et de la tradition tout en permettant l’intégration et l’adoption de nouveaux éléments et de nouvelles idées pour favoriser le progrès et le développement. » Modernition, néologisme créé à partir de « modernité » et « tradition », va venir désigner l’équilibre que nous créons entre ces deux conceptions. C’est finalement un nouveau mode de vie qui représente notre époque.  

Conclusion

Dans l’ensemble, ces néologismes suggèrent une génération d’étudiants engagée, consciente des enjeux sociaux, sociétaux, environnementaux, économiques et technologiques. Elle a un désir marqué de trouver des mots nouveaux pour décrire et comprendre le monde qui les entoure. En inventant ces termes, les étudiants ne créent pas seulement des mots. Ils façonnent notamment une linguistique qui témoigne de leur époque. En effet, ils esquissent un portrait riche en nuances, capturant les défis, les contradictions et les aspirations de notre société contemporaine. Cet exercice créatif devient alors une invitation à réfléchir au pouvoir des mots pour exprimer et transformer notre réalité.  

Les autres propositions se sont intéressées aux nuances de la vie moderne et au rapport aux autres. Découvrez la deuxième partie de notre analyse ici.

Merci à Adam, Adija, Anaïg, Bilal, Celou, Clara, Diana, Gaspard, Hugo, Martine, Maxime, Quentin, Yohann pour leur contribution. 

Rédaction : départements Études et Naming 

Un besoin, une problématique, une question ?

Parlons-en & rencontrons-nous!

Inscrivez-vous pour recevoir notre newsletter

échangeons ensemble